1 « Tisser sa Toile » : La relation mère et fille
J’ai photographié les femmes et leurs filles, en 2020/2021. Le protocole joué se rapproche du théâtre d’ombres : Les femmes et leurs filles se positionnent derrière des nappes et draps qu’elles apportent. Des flashs sont installés derrière elles, elles improvisent et rejouent leurs gestuelles intimes et familiales. La prise de vue se faisant à travers le tissu, avec les modèles.
Tout en évoquant la trame, le fil, le tissu, le fil d’Ariane, le projet a évolué sur des ombres qui nous parlent des peintures rupestres dans la notion de jaillissement et d’imprécation. Il y a une dimension archaïque que représente cette relation mère – fille, nœuds de transmission, de complicité, de rivalité, de vampirisme, mais ou la rationalité n’a pas de prise, inéluctable. L’obscurité se joue de la lumière.
Le théâtre d’ombres, c’est aussi l’incarnation de la parole, du chant, du cri, utilisé d’abord à des fins religieuses (évoquer l’âme des morts) et d’exorcisme. Le côté dépouillé de ce procédé met en perspective le corps et le mouvement des personnes dans une vision sans détour. Pas de visage, les postures sont archétypales et intemporelles.
L’ensemble se dirige vers une vision picturale et tachiste, une forme de renoncement aussi à la représentation.
2 « Tisser sa Toile » : La statuaire
Le deuxième volet de « Tisser sa toile » interroge la statuaire féminine dans les enclos paroissiaux du Finistère ( Guimiliau, Plougonven, Saint – Thégonnec, la Martyre, Sizun, la Roche – Maurice… )
Il s’agit de revenir au visage, à l’expression des émotions gravées par des artistes, sculpteurs ou « Ymageurs » du XVII ième siècle, comme Bastien et Henry Prigent, Roland Doré et d’autres, anonymes.
C’est l’époque de l’opulence, lorsque les communes bénéficiaient de l’essor du commerce des toiles de lin et qu’elles rivalisaient pour bâtir le plus bel enclos paroissial de la région. C’est l’époque aussi des grandes pestes et les calvaires sont bâtis pour les conjurer.
Ce face à face avec ces statues émouvantes, permet de ré – ancrer le travail sur le territoire et de valoriser le patrimoine breton. Ainsi les différents granits sombres, Kersanton noir ou gris, se marient avec la pierre de Logonna –Daoulas ocre, le style, mélange de celtique et gothique donne un rendu brut et sensible à la fois.
Une forme d’intemporalité, d’archaïsme est encore invoquée. L’outrage du temps, usure et intempéries, patine et effacement des peintures, disparition des visages, nous parlent de mémoire, du temps qui passe et de la mort.
1 ” Weaving the canvas “: The mother-daughter relationship
I photographed the women and their daughters, in 2020/2021. The protocol used is similar to shadow theatre: the women and their daughters position themselves behind tablecloths and sheets that they bring with them. Flashes are set up behind them, they improvise and replay their intimate and family gestures. The shots are taken through the fabric, with the models.
While evoking the weft, the thread, the fabric, Ariadne’s thread, the project has evolved on shadows that speak to us of cave paintings in the notion of gushing and imprecation. There is an archaic dimension represented by this mother-daughter relationship, knots of transmission, complicity, rivalry, vampirism, but where rationality has no hold, ineluctable. Darkness plays with light.
Shadow theater is also the embodiment of speech, song and cry, initially used for religious purposes (to evoke the souls of the dead) and exorcism. The stripped aspect of this process puts into perspective the body and the movement of people in a vision without detour. No faces, the postures are archetypal and timeless.
The whole tends towards a pictorial and tachist vision, a form of renunciation of representation.
2 ” Weaving the canvas “: Statuary
The second part of ” Weaving the canvas ” questions the feminine statuary in the parish enclosures of Finistère France (Guimiliau, Plougonven, Saint-Thégonnec, La Martyre, Sizun, La Roche-Maurice…)
It is a question of returning to the face, to the expression of the emotions engraved by artists, sculptors or “Ymageurs” of the XVIIth century, like Bastien and Henry Prigent, Roland Doré and others, anonymous.
It is the time of opulence, when the communes benefited from the development of the linen trade and competed to build the most beautiful parish enclosure of the region. It was also the time of the great plagues and the calvaries were built to ward them off.
This face to face with these moving statues, allows to re – anchor the work on the territory and to develop the Breton heritage. Thus the different dark granites, black or grey Kersanton, blend with the stone of Logonna -Daoulas ochre, the style, mixture of Celtic and Gothic gives a raw and sensitive rendering at the same time.
A form of timelessness, archaism is still invoked. The outrage of time, wear and tear and weathering, patina and fading of paintings, disappearance of faces, speak to us of memory, time passing and death.